S’il est un cépage qui m’émerveille chaque fois que je le déguste, c’est bien le Chenin. Originaire du Val de Loire, il incarne toute la diversité, la complexité et la poésie qu’un vin blanc peut offrir. Dans un même verre, on peut voyager d’un blanc sec tendu à un moelleux soyeux, sans oublier les fines bulles ou les licoreux presque éternels. Aujourd’hui, j’avais envie de lui rendre hommage — et de vous donner envie, peut-être, d’en ouvrir une bouteille.
Le Chenin : un cépage aux multiples expressions
Le Chenin, aussi appelé « Pinot de la Loire » ou encore « Steen » en Afrique du Sud, est un véritable caméléon. Peu de cépages possèdent cette capacité à se prêter à autant de styles de vinification :
Blancs secs : vifs, minéraux, parfois même austères dans leur jeunesse, mais promis à un bel avenir en cave.
Demi-secs : plus ronds, offrant un bel équilibre entre acidité et douceur.
Moelleux et liquoreux : riches, intenses, équilibrés par une acidité bien présente qui leur évite toute lourdeur.
Effervescents : notamment à Vouvray et Montlouis, où ils offrent des bulles fines et des notes de fruits blancs.
Ce potentiel s’explique notamment par son acidité naturelle marquée, une qualité précieuse pour les vinificateurs.
Le Val de Loire : terroir de prédilection du Chenin
De Vouvray à Savennières, en passant par Montlouis-sur-Loire, le Chenin trouve dans le Val de Loire un terrain de jeu incomparable. Il aime les sols calcaires, notamment les fameuses roches de tuffeau qu’on retrouve dans les maisons troglodytes de la région.
Chaque terroir imprime sa signature :
À Vouvray, le Chenin peut être sec, moelleux ou effervescent, d’où la nécessité de bien lire les étiquettes !
À Savennières, on obtient des vins de caractère, puissants, à la finale parfois amère dans leur jeunesse, mais taillés pour la garde.
À Montlouis, la fraîcheur domine, souvent accompagnée de notes de poire et d’agrumes.
Chenin et climat : un duo sensible mais résilient
Le Chenin n’est pas un cépage facile à cultiver. Il débourre tôt (il sort ses feuilles au printemps), ce qui le rend sensible aux gelées tardives. Et pourtant, il sait aussi profiter des climats frais et humides pour développer ce qu’on appelle la pourriture noble (Botrytis cinerea), indispensable pour les grands liquoreux.
Avec le réchauffement climatique, le Chenin fait face à de nouveaux défis, mais aussi à de nouvelles opportunités : son acidité naturelle lui permet de rester équilibré même lorsque les températures augmentent.
Le Chenin à l'international : l'exemple de l'Afrique du Sud
Peu le savent, mais l’Afrique du Sud est aujourd’hui le pays qui cultive le plus de Chenin au monde. Appelé localement Steen, ce cépage a été introduit par les Huguenots français au XVIIe siècle. Aujourd’hui, il y donne des vins plus ronds, souvent plus solaires, mais tout aussi passionnants.
D’ailleurs, certains vignerons sud-africains produisent des Chenins d’une finesse remarquable, rivalisant sans honte avec ceux de Loire. Une autre façon de redécouvrir ce cépage magique.
Comment choisir son Chenin ? Conseils pratiques
Pas toujours facile de s’y retrouver parmi les nombreuses appellations et styles que propose le Chenin. Voici quelques repères :
Regardez l’indice de sucrosité (quand il est indiqué) : sec, demi-sec, moelleux, etc.
Renseignez-vous sur le domaine : certains sont réputés pour un style particulier.
Faites confiance à votre caviste : il saura vous orienter selon vos goûts.
Et surtout, n’hésitez pas à goûter ! Car le Chenin, c’est aussi un vin de surprise, d’émotion, de découverte.
Le Chenin du Val de Loire est un cépage caméléon, exigeant mais généreux, capable de se faire à la fois tranchant et sensuel, minéral et gourmand. Il m’accompagne volontiers tout au long de l’année, tant sa palette est vaste. Si vous ne l’avez jamais exploré, je vous encourage à le faire — avec curiosité et un soupçon de patience. Car le Chenin, comme tous les grands vins, révèle ses secrets à qui sait l’écouter.